Mon train était en retard. J'ai manqué ma correspondance et me suis baladée à Strasbourg. Quelle belle ville. Comment ai-je pu vivre jusqu'à aujourd'hui sans y passer? Il faut venir à Strasbourg et y revenir si vous en êtes parti. Quand j'ai vu toutes ces boulangeries ça m’a rendu dingue.

Alors que j'avais mon sac trop lourd de vivres sur le dos, j'ai su que j’avais fait une erreur et où étaient mes angoisses. Je suis certaine que quand j’étais petite on a dû m’enfermer et me rationner.

Impossible d’acheter un bretzel ou une tarte aux myrtilles. Merci maman! Il faut que je mange d’abord ce que j’ai sur moi afin de m’alléger.  C’est un concept qui peut sembler inhabituel mais ici on s’en fiche, ça fondra comme la neige. Je vais boire un peu et sortir mes bâtons. Meme si je suis sûr que je n’aurai plus faim jusqu’à juillet au moins, mission accomplie: la charge de portage est devenue tout à fait raisonnable.


13h50 Wissembourg

- un sac de 5,7kg 

- plus 2,6 kilos moins 500g de vivres 

- 1,5 l d’eau



Pas de Gr5 aujourd’hui car il commence par le GR53. Honnêtement, j’ai commencé dessus le long de champs de blé en pensant à Arthur Rimbaud se faisant picoter et puis après j’ai plus trop suivi car j’ai mis la musique. J’ai juste avancé la fleur au fusil, l’esprit encore frais de milles pensées. Mais je n’ai pas de carte car il en fallait trop et tout ce qui est trop est trop lourd. J’aime je marcher légère. J’ai juste mon téléphone car le livre topo des Vosges était en reedition et les autres livres ont trop à lire et pas de cartes. J’ai bien pris quelques notes mais j’avais la flemme de les sortir de ma poche. Je regarderai demain. In challah.


Au final j’ai fait un patchwork de routes forestières, de départementale, du GR31, du tout terrain, du à travers champs puis de la ligne Maginot. C’est sympa cette région c’est un musée de bunkers et de châteaux. A croire que les gens d’ici ont passé une bonne partie de leur histoire à défendre leur frontière. Si John Lennon était là il dirait « pas de frontière, pas de guerre ».

Pourtant, un de ces arbres a poussé sur des fragments d’humérus de mon arrière-grand-père. Et quand je voie tous ces arbres je suis un peu inquiète. 

Après 30 kilomètres et un café terrace, comme j’avais chaud aux pieds je suis montée sur une colline, au château de Windstein (ne pas confondre avec Winterfield, Voir photo).

et j’ai mangé et planté ma tente. J’ai jamais été prête aussi tôt pour un bivouac, du coup j’écris des tartines en mangeant mon dessert à regarder ma batterie de téléphone s’effondrer.

J’ai beaucoup travaillé à m’alléger aujourd’hui alors demain je pourrai commencer à marcher et gouter aux plaisirs des bretzels. Et j’arrêterai d’écrire.